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Matis : quand l’art devient une opportunité d’investissement

La plateforme offre une opportunité unique d'entrer sur le marché de l'art en participant à des club deals dans un cadre régulé. Son ambition : combler un vide sur le marché européen en démocratisant l'investissement dans des œuvres d'artistes renommés. Rencontre avec François Carbone, son cofondateur.

Temps de lecture : 4 minute(s) - Par Caroline Courvoisier | Publié le 25-11-2024 14:00  Photo : (c) Julien Mouffron-Gardner  
Matis : quand l’art devient une opportunité d’investissement
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Vous aviez cofondé Anaxago il y a une dizaine d'années. Désormais vous êtes associé avec Arnaud Dubois, spécialiste du patrimoine artistique, au sein de Matis. Comment est née l'idée de cette association ?

C'est une société que j'aurais voulu connaître il y a quelques années : je souhaitais investir dans des œuvres d'art, mais je n’avais pas de connaissances préalables. J’ai donc recherché un professionnel qui pourrait m’aider. Je suis rapidement tombé sur Arnaud qui faisait du conseil en achat et vente d'œuvres d'art depuis près de dix ans avec son équipe. Au fil des discussions, nous sommes tombés sur un constat commun : il existe peu de services d’investissement dans l’art.

Arnaud s’était déjà heurté à des difficultés pour créer un fonds dédié. En parallèle, j'avais investi sur une plateforme américaine. Nous nous sommes rendu compte qu’il n’y avait rien de comparable en Europe. Arnaud sait parfaitement sourcer, acheter, valoriser les œuvres et les placer dans les bonnes galeries pour la revente, et je connais très bien le sujet des plateformes de financement participatif, des réglementations et de la relation aux investisseurs. L’idée entrepreneuriale a donc fait son chemin ! Matis est née de la synthèse de tout cela avec un objectif : créer une plateforme qui permette d’investir dans des œuvres d’art, dans un cadre régulé par l’Autorité des Marchés Financiers.

En moins de 2 ans, Matis a acquis des œuvres d'artistes comme Warhol, Soulages ou Kusama, qui est l'artiste féminine la plus « performante » de l'histoire de l'art. On connaît le côté émotionnel dans l'achat d'une œuvre, mais comment choisir de manière rationnelle pour que l'opération soit financièrement rentable ?

Notre thèse d'investissement comporte plusieurs points. Le premier, c'est que les œuvres doivent être valorisées à la fois par le marché et par les institutions muséales. La valeur d'une œuvre d'art est au carrefour de ces deux éléments. Le deuxième est que nous nous positionnons uniquement sur une période Après-guerre et contemporaine, sur des œuvres entre 500.000 et 5 millions d'euros. Parce que, de manière rationnelle, c'est sur ce segment que les volumes de transactions sont les plus élevés.
Et le troisième point, c'est que l’on met les œuvres en vente auprès de partenaires galeristes dès qu'elles sont achetées. Ce réseau est important, car il nous permet, en amont, de nous faire une idée claire du potentiel de revente. Or, la vraie complexité de notre métier, c’est de sourcer de très belles œuvres à un bon prix, tout en les revendant à un prix raisonnable à l’acquéreur final.

C’est un marché de niche et les frais de transaction sont élevés. Les œuvres vendues en maison de vente comprennent 15% de frais pour le vendeur et 25% pour l’acheteur. En clair, si vous achetez une œuvre au marteau pour 1 million d’euros, vous allez payer 1,25 million d’euros et le vendeur va toucher 850 000 euros. Nous sommes donc à la chasse aux opportunités pour dénicher les bonnes affaires. Une partie de notre métier est donc d’être informés par notre réseau, car nous devons très bien connaître nos points de sortie pour avoir confiance sur les points d'entrée.

Vous trouvez donc une œuvre à potentiel, puis vous la proposez en club deal à des investisseurs sur votre plateforme. Et c'est là que l'on retrouve votre savoir-faire en matière de financement participatif : le montage ressemble à celui du crowdfunding immobilier, avec une SAS qui porte l'œuvre et une émission d'obligations...

Ce n'est pas un hasard : nous avons passé en revue plusieurs modèles mais c’est celui qui nous apparaît le plus approprié, notamment pour éviter les frottements fiscaux pour l’investisseur.
Le schéma est le suivant : quand une œuvre est repérée par le comité d'investissement, nous définissons un prix d’achat maximum. Une fois que le contrat est signé, la société - dont l’objet social est uniquement l’achat et la revente de cette œuvre précise - émet des obligations convertibles en actions. Cela lui permet de collecter des fonds auprès des investisseurs pour l’acquisition.
Ensuite, une autre équipe de Matis se consacre à faire venir l’œuvre, à la réencadrer ou à la faire restaurer si nécessaire, avant de la signer dans la galerie la plus appropriée dans le but de la revendre. Par exemple, nous avons signé l’œuvre de Kusama en juillet dernier et la collecte s’est déroulée jusqu’à fin août. Elle a ensuite été confiée à 2 galeries et présentée à 2 foires dont la TEFAF de New York.
Enfin, la revente de l’œuvre déclenche automatiquement le remboursement des investisseurs. Ils obtiennent ainsi la totalité de la plus-value, diminuée de 20% qui représentent notre participation à la performance.
Le système d’obligations convertibles a aussi l’avantage de permettre aux investisseurs de reprendre la main sur la société en transformant leur créance en actions dans le cas où une œuvre ne serait toujours pas revendue au bout de cinq ans.


Vous dîtes que vous confiez les œuvres à une galerie : cela veut dire qu'au-delà de l'aspect financier, il est possible de satisfaire un côté plus émotionnel en allant voir l'œuvre dans laquelle on a investi ?

Tout à fait, les investisseurs savent la plupart du temps dans quelle galerie elle est placée. On ne se rend jamais aussi bien compte de la beauté et de la dimension d'une œuvre que lorsque l’on est en face. Même si l’on présente de belles vidéos ou des photos en ultra-haute définition, l’expérience réelle reste très différente. C’est pour cela que nous invitons également beaucoup nos clients dans les foires pour qu’ils puissent les découvrir. Nous voulons proposer une vraie expérience d’investissement aux clients qui le veulent, dans un esprit « club », qu’ils soient grands collectionneurs ou néophytes. Nous leur réservons également d’autres choses, mais sur cela, je préfère garder la surprise...

Matis est une plateforme agréée PSFP (Prestataire de Services en Financement Participatif) par l’Autorité des Marchés Financiers. En mai dernier, elle a bouclé une levée de fonds de 3 millions d’euros pour financer son développement en Europe.Depuis 2023, les membres des clubs deals ont investi dans 26 œuvres ; et 4 ont été cédées pour une performance nette moyenne de 15,9% pour les investisseurs. Comme toujours, l’investissement comporte des risques de perte en capital, et les performances réalisées sur certaines œuvres ne préjugent pas des performances futures.Ticket d’entrée : 20 000 €.

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