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L'envolée et les soubresauts des cryptoactifs ont permis à certains investisseurs de gagner de l'argent, parfois même beaucoup. Mais derrière l'adrénaline des hausses et des baisses, une réalité moins réjouissante s'impose : les obligations fiscales. Il n'est alors plus seulement question de savoir quand acheter ou vendre, mais aussi quoi déclarer.
Avant même d’avoir enregistré un gain, la première obligation qui incombe aux détenteurs de cryptomonnaies est de déclarer leurs comptes détenus sur des plateformes étrangères. Binance, Kraken, Bitpanda ou Coinbase, parmi les plus connues, sont notamment concernées. Les contribuables doivent informer l’administration fiscale lors de leur déclaration annuelle de revenus. En cas d’oubli, l’amende encourue est de 750 euros.Vient ensuite la déclaration des éventuelles plus-values. Pour les particuliers, les gains réalisés sur les ventes de cryptoactifs sont soumis à l’impôt sur le revenu dès qu’ils dépassent 305 euros. Ils sont imposés au taux de 30 % via la flat tax ou, selon ce qui est le plus avantageux pour le contribuable, au barème progressif de l’impôt sur le revenu auquel il faut ajouter les prélèvements sociaux de 17,2 %.Mais attention aux subtilités : « l’administration fiscale considère comme taxable une vente qui offre une contrepartie cash ou tout échange à titre onéreux (hors échange d’actifs numériques) : ainsi, un échange contre une monnaie officielle comme l’euro ou le dollar, mais aussi contre de l’or, des biens ou des services est taxable », explique Maître Frédéric Paquet, avocat fiscaliste au sein du cabinet De Gaulle Fleurance. Un particulier qui utilise ses gains en bitcoins pour acheter un smartphone relève, par exemple, de l’impôt.
Les choses auraient pu être simples si elles s’étaient arrêtées là. Or, une complexité de taille se cache dans le mode de calcul des plus-values.« Pour déterminer le montant de la plus-value, la loi impose un calcul spécifique du prix d’acquisition tenant compte du prix de revient de l’ensemble du portefeuille d’actifs numériques et de sa valeur à la date de la vente, ce qui implique de suivre les fluctuations du portefeuille et de conserver une trace de toutes les transactions effectuées », poursuit Maître Frédéric Paquet. Prenons un exemple où vous achetez d’abord 1 jeton d’une cryptomonnaie pour 1 000 €, puis 2 jetons supplémentaires pour 3 400 € chacun. Vous aurez ainsi acheté 3 jetons pour 7 800 €. Si vous revendez l’un de ces jetons 3 000 € et que la valeur de votre portefeuille est alors de 9 000 €, votre prix d’acquisition pondéré est de 2 600 € (7800*3000/9000) et votre plus-value est alors de 400 €.Ces calculs savants peuvent vite dépasser les particuliers qui effectuent de multiples transactions en cours d’année avec plusieurs plus-values à calculer et des retraitements à effectuer. Contrairement aux courtiers en Bourse, les plateformes de cryptomonnaies ne peuvent pas suivre avec précision l’ensemble des opérations de leurs clients. Dans cet univers, les échanges se font de manière directe, de compte à compte : les données ne leur sont pas toujours accessibles, surtout si la transaction implique un compte externe.Pour simplifier les démarches de leurs clients, un nombre croissant d’entre elles proposent à leurs clients d’adhérer à Waltio, un service qui comptabilise toutes leurs transactions. « Notre outil se connecte sur les comptes des clients, récupère l’historique, suit les mouvements, calcule automatiquement les plus et moins-values, et édite un rapport fiscal », explique Pierre Morizot, cofondateur et président de la société qui revendique 35 000 utilisateurs actifs en Europe. « Les utilisateurs obtiennent un document qui leur sert à faire leur déclaration, mais aussi en cas de contrôle fiscal ou parfois pour justifier l’origine de leurs fonds auprès des banques ». Un coup de pouce, qui implique un coût supplémentaire dès que le particulier effectue plus de 50 transactions par an.
Lorsque le volume de transactions devient important, le contribuable peut entrer sans le savoir dans une activité que l’administration fiscale considérera comme professionnelle. Dans ce cas, les conséquences sont lourdes.« L’administration fiscale peut considérer comme professionnelle toute personne dont l’activité liée aux crypto-actifs n’est pas occasionnelle, mais devient régulière, sophistiquée et/ou prédominante par rapport à ses autres revenus », explique Maître Frédéric Paquet. Une activité de trading dont les gains commencent à dépasser le montant d’un salaire peut ainsi être requalifiée, mais d’autres critères entrent en jeu. « Si vous déployez des moyens matériels et informatiques importants, comme des logiciels d’automatisation, ou si vous exercez le trading de manière habituelle ou encore des activités de minage et même si ce n’est pas votre activité professionnelle, le fisc peut considérer que vous devez être imposé dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC) ».Cette considération est loin d’être anodine. Passer du statut de particulier à celui de professionnel entraîne d’autres obligations : s’immatriculer, adhérer à l’URSSAF, aux caisses de retraite (donc payer des charges) et tenir une comptabilité rigoureuse. Quand faut-il s’inquiéter ? « La frontière reste difficile à tracer et elle est loin de concerner tout le monde, rassure l’avocat fiscaliste. Mais les personnes qui ont tiré leur épingle du jeu dans cette révolution numérique, et qui ont réussi à en faire une source de profits habituelle et structurée doivent se poser les bonnes questions ».