Sortie le 7 novembre
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Face à la chute des recettes issues de l'immobilier, les départements cherchent des solutions pour renflouer leurs caisses. Une idée, séduisante pour certains mais polémique, commence à émerger : augmenter les frais de notaire. Entre impératifs budgétaires et impact sur le marché, cet arbitrage fiscal pourrait bien être un tournant.
Le projet de loi de finances (PLF) 2025 met les collectivités locales sous pression. Leurs recettes, autrefois soutenues par un marché immobilier dynamique, se sont effondrées. « Ce sont des milliards d’euros qui disparaissent », murmure-t-on dans les couloirs du ministère de l’Économie. En un an, le nombre de transactions immobilières est passé de 1,14 million à 780 000, selon les notaires de France. Bien que ce niveau soit supérieur à celui d’avant 2015, la chute reste vertigineuse. Les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), cette source de revenus essentielle pour les départements, se sont effrités, passant de plus de 16 milliards d'euros en 2022 à environ 10 milliards cette année.C'est donc un véritable trou dans la caisse, à l'heure où chacun cherche des sources de financement. Alors que les budgets sont sous tension, une proposition émerge : augmenter les frais de notaire, ces taxes payées lors de l’achat d’un bien immobilier. Une hausse d’un point de la part des départements — de 4,5 % à 5,5 % — pourrait rapporter 2,2 milliards d’euros, un coup de pouce non négligeable. Mais la mesure soulève des critiques.
Lors de l'achat d'un bien immobilier, les acheteurs paient entre 7 et 8 % de « frais de notaire ». En réalité, le notaire n'en touche pas grand-chose : la somme est surtout répartie entre l'Etat et le département, ce dernier en percevant un peu plus de la moitié.
Les acteurs de l’immobilier sont bien évidemment vent debout contre cette idée. Pour eux, une telle hausse pourrait briser la dynamique timide de reprise du marché. « Alors que le marché commence à reprendre des couleurs, on veut encore alourdir la facture des acquéreurs. C’est contre-productif ! » s’exclame Loïc Cantin, président de la Fédération Nationale de l’Immobilier (FNAIM), selon les propos rapportés par BatiWeb. Une hausse des frais de notaire serait, selon lui, un frein de plus pour des acheteurs déjà confrontés à des taux d’intérêt en hausse et à des prix d’acquisition élevés.Mais qu'en pense-t-on au sommet de l'Etat ? La ministre du Logement, Valérie Létard, se montre réservée. Elle rappelle que les DMTO sont cruciaux pour les départements, mais appelle à la prudence. Lors d’une récente conférence, elle a évoqué le risque de « gripper la mécanique » de la reprise. « Une hausse de cette taxe pourrait ralentir la reprise. Le marché immobilier est fragile, il faut le relancer, pas l’étouffer », affirmait-elle encore récemment sur France Info.Mais Aussi Catherine Vautrin, ministre du Partenariat avec les territoires, voit les choses d'un autre œil. Pour elle, l'effort est nécessaire, et une hausse des DMTO pourrait être une solution immédiate. « Nous sommes parfaitement ouverts à une augmentation», a-t-elle affirmé. Pas question de rétablir la taxe d’habitation, mais des DMTO à 9 % ? C'est envisageable.
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En attendant, sur le terrain, les départements peinent à boucler leurs budgets. La baisse des transactions a des conséquences directes sur leur capacité à financer les services essentiels. Le département du Nord, par exemple, accuse un manque de 60 millions d’euros en recettes cette année, menaçant le financement du RSA, de la protection de l’enfance ou encore de l’aide à l’autonomie. La réduction des DMTO et les 5 milliards d'euros d’économies demandés aux collectivités locales dans le budget 2025 accentuent cette pression.Au-delà des ministères et des collectivités, ce sont aussi les acheteurs et investisseurs qui suivent de près la situation. Pour eux, chaque augmentation compte, notamment lorsqu'il s'agit d'obtenir un crédit. Une hausse des frais de notaire signifie des coûts d'acquisition plus lourds, des marges de manœuvre plus étroites. La hausse des prix d’achat dans certaines communes rogne le pouvoir d’achat et pourrait freiner, une fois encore, la reprise fragile du marché immobilier.Les promoteurs immobiliers, eux, tirent déjà la sonnette d’alarme depuis bien longtemps. Ils rappellent que, dans un marché où les taux d’intérêt peinent à se stabiliser et où les prix de l’immobilier oscillent, une hausse des frais d’acquisition serait un nouveau coup dur pour les acheteurs. Et cela sans oublier les 20 % de TVA que l'État ne percevra jamais sur les logements neufs qui ne verront pas le jour.
Les avis divergent, et la question est lancinante : doit-on vraiment augmenter les taxes pour sauver les finances locales, quitte à faire fuir les acheteurs et plomber un peu plus le marché ? Valérie Létard campe sur ses positions : elle préfère une relance du pour générer des recettes durables. « Si le marché redémarre vraiment, affirme-t-elle, cela rapportera bien plus qu’une simple hausse des taxes. » Une stratégie de long terme, qui pourrait passer par des incitations et un PTZ plus accessible.Alors que les députés continuent de débattre du PLF 2025, les regards sont donc tournés vers Matignon. Entre les besoins budgétaires des départements et la fragilité d’un marché immobilier à peine convalescent, le choix n’est pas simple. Augmenter les droits de mutation pourrait répondre à l’urgence, mais à quel prix pour l'avenir du marché ? L’arbitrage final s’annonce délicat. Dans ce bras de fer fiscal, il est clair que chaque point compte : chaque taxe de plus pourrait être la taxe de trop.