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Baisse du marché immobilier : quels dommages collatéraux ?

Les prix du neuf et de l'ancien sont à la baisse, marqués par le durcissement du crédit et le coup de rabot sur le Pinel. Mais un marché à plusieurs vitesses pourrait émerger.

Temps de lecture : 3 minute(s) - Par C Dulary | Mis à jour le 10-03-2023 13:37:00 | Publié le 10-03-2023 13:24  Photo : Shutterstock  
Baisse du marché immobilier : quels dommages collatéraux ?

-0,2% sur les prix en 1 an et des ventes qui calent

Cette fois, nous y sommes : selon MeilleursAgents, les prix de l'immobilier ont baissé de 0,2% depuis le début de l'année sur l'ensemble du territoire. Un fléchissement modeste, mais un signal de plus quant à l'enclenchement du « retournement de marché ». Selon Xerfi, le volume des ventes pourrait baisser de 10% dans l'ancien et de 5% dans le neuf.

Le principal facteur du blocage est dû aux crédits : les taux ont doublé en un an et le pouvoir d'achat des ménages s'est considérablement réduit. Après des années historiques, le durcissement des conditions d'accès exigés par le HCSF et le retour de la hausse des taux ont eu un effet radical. Les demandes de financement ont chuté de 10% en 2022, puis reculé de 14,4% en début d'année. Parmi les dossiers restants, seul un peu plus d'un dossier sur deux est finançable, contre 70% en 2021.

Les 10 plus grandes villes affichent une baisse de 0,7% en moyenne depuis le début de l'année. En février, seules Nice et Bordeaux résistent globalement (+0,7% et +0%). Nantes, Lyon (-1%), Lille (-0,7%), Paris (-0,8%), Strasbourg (-0,3%) fléchissent.
Les communes rurales, dont beaucoup avaient vu les prix s'envoler à la sortie du Covid, encaissent une baisse de 0,4%. Le report des citadins vers la campagne grâce au télétravail semble révolu.

Phénomène nouveau, les biens dont l'étiquette de DPE affiche une performance énergétique G ou F sont en suroffre. Ceux-ci seront en effet interdits à la location respectivement à partir de 2025 et 2028, et l'augmentation des loyers y est interdite depuis l'année dernière.
Selon le Service de la donnée et des études statistiques (SDES), plus de 7 millions de logements sont concernés. Faute de pouvoir les rénover, beaucoup de propriétaires se décident à les vendre. Les autres biens, qui pourraient en temps normal se maintenir ou subir une hausse des prix, sont aussi pénalisés par la hausse des crédits.

En 2034, les biens à DPE « E » seront à leur tour interdits de location.

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Dans le neuf, les réservations s'écroulent, mais les prix continuent d'augmenter

Malgré ses bonnes performances énergétiques, l'immobilier neuf n'est pas mieux loti. D'un côté, le resserrement du crédit empêche les acheteurs d'obtenir les prêts nécessaires à leur achat. De l'autre les prix, déjà supérieurs à l'ancien, continuent de monter portés par la hausse du coût de construction (normes, pénuries de matériaux...) et le prix toujours élevé des terrains constructibles.

Troisième phénomène bloquant : le durcissement des conditions d'éligibilité à la loi Pinel, qui n'incite plus beaucoup à l'investissement locatif. Or, les investisseurs représentent environ la moitié des ventes.

En un an, le nombre de réservations a ainsi chuté de près de 25%. Selon la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI), le taux de désistement a aussi explosé : 50% des clients se rétractent contre 15% en temps normal. Les ventes en bloc aux bailleurs sociaux et fonds immobiliers, loin de compenser, sont aussi en baisse. Face à ces signaux négatifs, il n'est pas exclu que certaines opérations soient annulées et que subissent de francs retards.




L'immobilier démontre encore une fois son caractère cyclique : 1982, 1992, 2008, 2013... Environ une fois par décennie, une baisse s'enclenche, causée par divers facteurs. L'année 2023 est bien partie pour être celle d'une nouvelle phase de recul.
Il ne faut cependant pas oublier qu'en 30 ans, les prix de l'immobilier ont quasiment triplé, portés par des taux de crédits divisés par 7 à 8. À moins de subir une inflation importante et durable, le prix des logements devrait rester très loin de leur niveau des années 2000. Entre autres raisons, les contextes juridiques et économiques qui ont beaucoup évolué, et les nouveaux règlements énergétiques qui viennent bouleverser la donne.

Quid du crowdfunding immobilier et des SCPI ?

Ce fléchissement du marché immobilier ne réjouira pas grand monde. Ni les acheteurs exclus du crédit, ni les vendeurs qui trouvent leur projet de cession contrarié, ni les professionnels qui gravitent de près ou de loin autour du secteur.

Premiers inquiets, les sociétés immobilières : agences, promoteurs, et entreprises du bâtiment. Si les sociétés bien établies ont de la trésorerie d'avance et pourront faire face à une éventuelle crise prolongée, les acteurs plus fragiles seront les plus pénalisés.

Les plateformes de crowdfunding immobilier, qui proposent aux particuliers de financer des opérations, devront aussi se montrer plus sélectives dans les projets. Dans ce contexte difficile, les risques de défaillance sont accrus. Or, la réduction des volumes financés pourrait elle-même s'avérer problématique pour les plateformes dont la rentabilité dépend du nombre de projets financés. La facturation de frais aux investisseurs pourrait-elle ici devenir salutaire ? Pour les investisseurs, une vigilance accrue est de mise : considérer le délai de remboursement comme hypothétique et n'investir que des sommes dont la perte n'affecterait pas le niveau de vie.

Les SCPI et foncières pourraient à l'inverse tirer leur épingle du jeu à long terme. Certes, une baisse des prix de l'immobilier d'entreprise, qui suit les mêmes traces que le marché du logement, pourrait entraîner une réduction de la valeur de leur patrimoine. Mais leur avantage est de disposer d'une trésorerie conséquente grâce à leurs collectes. Peu, voire pas touchées par la crise du crédit, les baisses de prix forment au contraire des opportunités pour acquérir de nouveaux immeubles à moindres frais. D'autant que les loyers ont tendance à suivre l'inflation et restent – pour le moment – orientés à la hausse.

Quelle que soit leur situation, les particuliers doivent rester vigilants quant à leurs décisions financières et patrimoniales dans ce contexte incertain.



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