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Le ton dominant des musiques écoutées dans un pays pourrait prédire la performance de l'indice boursier national. Les auteurs de l'étude soulignent les impacts de l'humeur dans les choix d'investissement et invitent les particuliers à prendre leurs décisions la tête froide.
En bourse, l'évolution des cours repose sur la rencontre entre l'offre et la demande sur les marchés financiers. Elle est le fruit des anticipations des investisseurs en fonction de nombreux paramètres économiques, sociaux, financiers, sectoriels... Sauf que les décisions d'investissement pourraient ne pas être aussi rationnelles ! Selon une étude intitulée « Music Sentiment and Stock Returns Around the World », menée par les économistes Alexandre Garel (professeur à l'école de commerce nantaise Audencia), Alex Edmans (London Business School), Adrian Fernandez-Perez et Ivan Indriawan (Auckland University of Technology), il serait possible de prédire les rendements des marchés en fonction de l'humeur moyenne des individus d'un pays... grâce à la musique qu'ils écoutent. « Certains travaux en psychologie montrent que l'on choisit d'écouter une chanson ou un morceau de musique parce qu'ils sont le miroir de notre état d'esprit », explique le professeur Alexandre Garel. Or, l'humeur jouerait un rôle important dans les décisions d'investissement. Pour tenter de mettre en évidence ce lien, les chercheurs se sont basés sur les données de la plateforme de musique Spotify et ses 345 millions d'utilisateurs. L'analyse a porté sur toute l'année 2020, soit plus de 500 milliards d'écoute dans 40 pays. « Spotify utilise un algorithme qui quantifie, pour chaque chanson, la positivité de sa mélodie. Par exemple, « September » du groupe Earth, Wind, and Fire est la chanson la plus positive de la plateforme et « Legion Inoculant » du groupe Tool est la plus négative », explique le chercheur. Ce classement a donné lieu au calcul d'un « sentiment musical », censé refléter l'humeur moyenne de la population d'un pays.
Selon les auteurs de l'étude, l'analyse à grande échelle des choix musicaux permet de mettre en lumière l'humeur moyenne d'une population. Le « sentiment musical » est par exemple meilleur les jours ensoleillés ou durant la période où les jours rallongent. Il a également été plus positif lors de l'assouplissement des restrictions liées au Covid-19, ce qui a été mis en lumière par des études en psychiatrie.
L'équipe a ensuite comparé les évolutions de l'humeur des populations aux variations des performances boursières de leur pays. Selon ses conclusions, il existerait bien un lien de corrélation entre les changements de ton des musiques écoutées et les rendements. « Une amélioration de la positivité de la musique (et donc de l'humeur des individus d'un pays) pour une semaine donnée est, en moyenne, associée à une augmentation significative des rendements boursiers de 8,1 points de base du marché d'un pays au cours de la même semaine (ou 4,3 % annualisé) », peut-on lire. Le phénomène inverse serait aussi été observé, confirmant, selon les chercheurs, que « les rendements induits par les changements d'humeurs ne sont pas liés aux fondamentaux économiques, puisque les gains de valeur ne se poursuivent pas dans le temps ».
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Alors faut-il que les traders se penchent sur l'algorithme de Spotify avant de prendre leurs décisions d'investissement ? Peut-être pas. L'objectif des auteurs de l'étude est avant tout de mettre en lumière le fait que les décisions financières sont influencées par les émotions. « Nos recherches démontrent que votre état d'esprit influence votre choix d'investissement et donc vos rendements », explique Alexandre Garel. « Cela a des implications importantes pour tous les investisseurs, tant les individus qui tentent de choisir un fonds commun de placement pour leur retraite que les traders qui investissent pour un client. Notre message est simple : avant toute décision, posez-vous un instant et demandez-vous si votre choix est guidé par l'analyse plutôt que par les émotions. Et si vous vous sentez particulièrement heureux ou malheureux ce jour-là, peut-être serait-il sage de reporter la décision au lendemain. »
Il ne s'agit pas de la première étude qui tente de faire le lien entre des décisions économiques et la musique. Un nombre croissant de chercheurs se penchent sur cette question. En 2018, la Banque centrale d'Angleterre avait aussi utilisé les données de téléchargements de musique sur Spotify pour tenter de cerner l'humeur de la population et de faire un lien avec la consommation. Selon Andy Haldane, son chef économiste, les résultats avant été « au moins aussi bons » que les enquêtes de confiance. « Et pourquoi s'arrêter à la musique ? Les goûts des gens en matière de livres, de télévision et de radio peuvent également offrir une fenêtre sur leur âme. Il en va de même pour leurs goûts en matière de jeux [vidéos] », avait-il conclu. En effet, les jeux vidéo en ligne comme World of Warcraft, qui mettent en place des systèmes économiques primitifs, sont également analysés par les économistes pour déceler l'humeur moyenne du public ou leurs réactions à certaines décisions politiques hypothétiques.
L'étude « Music Sentiment and Stock Returns Around the World » est disponible en preprint sur le réseau SSRN spécialisé en sciences sociales, économiques et juridiques. Il s'agit d'un preprit, c'est-à-dire qu'elle n'a pas encore été revue par d'autres chercheurs.
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