Actuellement en kiosque et sur commande
Continuer avec Google
Continuer avec Facebook
Continuer avec Apple
Si la crise économique est bien là, l'INSEE indique qu'elle est moins sévère que prévu. Le FMI au contraire avance que la France est l'un des pays les plus touchés. Qu'en est-il ?
Depuis le début du confinement, la question n'est pas de savoir si la crise économique va frapper, mais quelle va être son ampleur. De nombreuses prévisions ont été faites. Mais la situation étant exceptionnelle, personne n'a pu miser avec certitude sur un scénario particulier. Tout dépendait de la durée du confinement et du comportement qu'allaient adopter ménages et entreprises une fois déconfinés. Un mois et demi après le déconfinement, les chiffres commencent à parler. Si la crise est bien là, certaines sources indiquent que celle-ci est moins sévère que prévu. L'INSEE, Institut national de la statistique et des études économiques, tablait en mai sur un recul du PIB 20% au deuxième trimestre 2020 (avril, mai, juin). Le 17 juin, l'institut a revu ses prévisions à -17. Une situation certes dégradée, mais moins que ce qui avait été anticipé grâce à l'accélération du déconfinement. Le rebond de la consommation des ménages se consolide, confirmant l'existence d'un effet de rattrapage. Les particuliers semblent avoir en grande majorité uniquement reporté les achats qu'ils n'avaient pu faire pendant le confinement. Ils viennent ainsi piocher dans l'épargne accumulée pendant le confinement. La consommation reprend plus vite que la production, ce qui a pour effet de commencer à faire diminuer les stocks de production constitués par les entreprises pendant le confinement. L'INSEE souligne « la reprise de pratiques plus habituelles de consommation ». L'économie envoie donc des signaux positifs. La confiance des ménages, donnée primordiale pour l'économie puisqu'elle oriente leur tendance à consommer ou à épargner, est donc de retour. L'institut indique cependant que la reprise est très contrastée en fonction des secteurs. « Tous les indicateurs ne reviennent pas de la même façon à la normale... et certains n'y reviendront sans doute pas avant quelque temps. Par exemple, fin mai, alors que la perte d'activité économique aurait été d'un cinquième par rapport au niveau d'avant crise, les déplacements domicile travail estimés à l'aide de données de téléphonie mobile seraient restés 40 % en dessous de leur niveau d'avant le confinement. », explique l'INSEE dans son point de conjoncture. C'est notamment cette lecture de différents indices sans le contexte global qui peut donner l'impression d'obtenir des informations contradictoires.
Le cabinet IHS Markit établit régulièrement « l'indice PMI », aussi appelé « indice des directeurs d'achat ». Cet indice économique reflète l'activité de l'industrie manufacturière (l'ensemble des entreprises produisant en usine, appartenant par exemple au secteur du textile, de la chimie, de la métallurgie, de l'automobile...). L'indice PMI prend en compte la prise de commandes, la production, l'emploi, les livraisons et les stocks. Lorsqu'il est supérieur à 50% il indique une croissance du secteur, à l'inverse, un chiffre inférieur à 50% est synonyme de baisse. Dans sa dernière analyse flash, IHS Markit explique qu'à l'échelle européenne, l'assouplissement des mesures de confinement a entraîné « un fort ralentissement de la contraction économique en juin ». Autrement dit, l'activité économique du secteur manufacturier ralentit toujours en juin par rapport à la même période de 2019, mais beaucoup moins que ces derniers mois. Parmi les pays examinés, la France rebondit bien, même mieux que l'Allemagne à laquelle le pays est souvent comparé. L'indice PMI français est ainsi passé de 32,1% en mai à 51,3% en juin, son plus haut niveau depuis septembre 2018. Un chiffre qui met en relief la première croissance de l'activité du secteur manufacturier depuis février 2020. Cette bonne nouvelle ne doit pas cependant être sortie de son contexte et extrapolée à l'ensemble de l'économie. On parle ici uniquement du secteur manufacturier, qui ne représentait « que » 13,3% du PIB en 2018 (voir la composition du PIB français selon les secteurs sur le site de l'INSEE). L'indice PMI ne représente pas l'intégralité de l'économie et ne peut donc pas s'analyser seul. Il ne prend par exemple pas en compte le secteur des services (76,1% du PIB), dont fait notamment parti le tourisme (7,4% du PIB selon les données du ministère de l'Économie). Or, le tourisme risque d'être durement pénalisé par la crise du coronavirus, la France étant la première destination touristique mondiale en temps normal avec 89 millions de visiteurs étrangers.
Rejoignez la communauté Idéal investisseur ! Je m'inscris
L'analyse du Fonds Monétaire International (FMI) tranche beaucoup avec un potentiel regain d'optimisme. Selon l'institution internationale (pour en savoir plus sur le FMI, c'est ici), la crise mondiale annoncée est « plus sévère que prévu ». Une information peu réjouissante, puisque le FMI prévoyait déjà la « pire récession depuis les années 1930 » en avril dernier. Selon l'analyse publiée le 24 juin par le FMI, la baisse du PIB atteindrait 12,5% en France pour toute l'année 2020. Autrement dit, la valeur totale de la production de richesses du pays chuterait de 12,5% par rapport à 2019, ce qui est d'une ampleur considérable. Le pays arriverait parmi les 3 pays les plus touchés du monde par la crise, avec l'Italie et l'Espagne. La zone euro émargerait quant à elle à -10,2% en moyenne. Pour la première fois de l'Histoire de l'humanité, l'ensemble du monde devra être en récession la même année, sauf la Chine. (Voir notre article sur les conséquences d'une récession). Dans le monde, le recul devrait atteindre en moyenne de 4,9%. Gita Gopinath, professeur en économie internationale à l'université d'Harvard et chef économiste du Fonds monétaire international, explique que ce chiffre a été révisé à la baisse, du fait « des résultats pires que prévu au premier semestre, du maintien attendu des mesures de distanciation physique au deuxième semestre et de la dégradation du potentiel de l'offre ». Elle souligne toutefois que ces projections sont soumises à de grandes incertitudes, positives (diffusion d'un vaccin, traitement) comme négatives (deuxième vague du coronavirus). Une note positive cependant : « cette crise sans précédent sera suivie d'une reprise sans précédent. »
Si la crise économique est bien là, son ampleur et la capacité des économies à rebondir restent donc à confirmer dans les prochains mois. Une grande incertitude continue de régner : si les chiffres constatés par l'INSEE ou le cabinet lHS Markit sont pour le moment meilleurs que prévus, le FMI reste pessimiste sur les possibilités de reprise générale à moyen terme et a même dégradé ses prévisions. Ces analyses, qui peuvent sembler contradictoires à première vue, soulignent la complexité de l'analyse économique et l'intervention de très nombreux facteurs dans l'évolution des perspectives. N'oublions pas aussi que les comportements des individus prennent une place prépondérante dans l'évolution de l'économie. Or, ceux-ci dépendent du climat économique global, mais aussi de la perception qu'ils en ont et des anticipations qui en découlent. Elles mettent aussi en lumière l'importance de replacer les chiffres et analyses dans leur contexte et de croiser plusieurs pour se forger une opinion éclairée.