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Homéopathie : pourquoi elle ne sera plus remboursée

Le ministère de la Santé vient d'annoncer le déremboursement de l'homéopathie par l'Assurance-maladie à partir du 1er janvier 2021. Une décision qui devrait permettre d'économiser 126 millions d'euros par an, mais qui soulève de nombreux mécontentements.

Temps de lecture : 3 minute(s) - Par Céline Dulary | Mis à jour le 10-07-2019 14:17:00 | Publié le 10-07-2019 13:07  Photo : (c)Shutterstock  
Homéopathie : pourquoi elle ne sera plus remboursée

La tribune anti « Fakemed » : le pavé dans la mare

En mars 2018, un collectif de 124 professionnels de santé publiait dans le Figaro une tribune contre les « médecines alternatives », dont l'homéopathie. « Les thérapies dites « alternatives » sont inefficaces au-delà de l'effet placebo et n'en sont pas moins dangereuses. », pouvait-on lire. Le collectif FakeMed y demandait notamment l'arrêt du remboursement de l'homéopathie par la Sécurité Sociale.

Actuellement, ces traitements sont en effet remboursés à hauteur de 30%. Mais pour cela, ils bénéficient d'un régime d'exception. Si tous les médicaments voient leurs effets évalués tous les 5 à 10 ans pour prétendre au remboursement, ce n'est pas le cas de l'homéopathie : en 1984, la ministre de la Santé de l'époque Georgina Dufoix avait autorisé une prise en charge par la Sécurité Sociale sans passer par cette procédure.

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La prise de position du Conseil de l'Ordre des médecins

Dès sa publication, la « tribune des 124 » avait fait couler beaucoup d'encre. Elle avait notamment valu une convocation de ses signataires devant l'Ordre des médecins, après des plaintes nominatives déposées par des médecins homéopathes pour « non-confraternité ».

Quelques mois plus tard, le Conseil national de l'Ordre des médecins prenait position sur le sujet. D'une part, il précisait que « le traitement préconisé par un médecin ne peut, en aucun cas, être alternatif aux données acquises de la science et à l'état de l'art ». D'autre part, il rappelait que la prescription d'un traitement homéopathique ne pouvait se faire qu'après avoir « délivré au patient une information loyale, claire, et appropriée », soit après avoir expliqué au patient qu'en l'état actuel de la science, l'efficacité de l'homéopathie est considérée comme équivalente à celle d'un placebo.




L'efficacité de l'homéopathie est régulièrement remise en cause. Apparue au XVIIIème siècle, elle repose sur le principe de « similitude ». Une substance qui provoquerait des symptômes à une personne en bonne santé est diluée un certain nombre de fois. Cette dilution permettrait d'apaiser les symptômes chez un malade.
Or, à partir de quelques dilutions, les études scientifiques montrent qu'aucun principe actif n'est retrouvé dans les granules homéopathiques. Le principe est donc jugé farfelu par les uns, mais pour les partisans de l'homéopathie, ce sont les méthodes d'évaluation qui ne sont pas adaptées à ses spécificités.

La Haute Autorité de Santé conclue à une absence de preuve d'efficacité des traitements homéopathiques

Face à la fronde, Agnès Buzyn, ministre de la Santé, avait décidé début 2019 de confier une mission d'évaluation des traitements homéopathiques à la Haute Autorité de Santé (HAS). En France, c'est cette entité qui est chargée d'évaluer les médicaments en vue de leur remboursement par la Sécurité Sociale.

Fin juin, la HAS a donc rendu son rapport. Celui-ci préconise le déremboursement de l'homéopathie du fait « d'une efficacité insuffisamment démontrée ». Selon ses conclusions, les 800 études internationales analysées, les dossiers déposés par les laboratoires concernés et les contributions de professionnels de santé n'ont pas apporté de preuve de son efficacité.

L'homéopathie va-t-elle être interdite ?
Non, il s'agit uniquement d'un déremboursement, une procédure courante lorsque les médicaments sont jugés insuffisamment efficaces par la HAS. Les patients pourront continuer à avoir recours à l'homéopathie, mais celle-ci ne sera plus financée par la Sécurité Sociale.



Le déremboursement acté par le Gouvernement sous les protestations

Agnès Buzyn avait déclaré très tôt qu'elle se rangerait à l'avis de la Haute Autorité de Santé. Le 10 juillet, un communiqué du ministère de la Santé a donc confirmé que les traitements homéopathiques ne seraient plus remboursés à compter du 1er janvier 2021. En 2020, le remboursement passera de 30% à 15%, ce palier étant destiné, selon la ministre, aux patients et à l'industrie de s'adapter.

Avant même la décision, le déremboursement de l'homéopathie a soulevé des protestations. Une pétition lancée sur Internet a recueilli plus de 1 million de signatures. Plusieurs élus ont fait part de leur désapprobation, parmi lesquels le maire de Lyon et ex-ministre de l'Intérieur Gérard Collomb dont la région abrite le siège du leader mondial de l'homéopathie Boiron, et Xavier Bertrand, président de la région Hauts de France.

Les laboratoires ont également vivement réagi, expliquant que cette décision mettait 1300 emplois à risque. Selon Alain Coard, délégué CFE-CGC aux laboratoires Boiron interrogé par Europe 1, « en cas de déremboursement, on aurait une baisse des ventes d'environ 50% la première année, puis 50% la deuxième année ».

Quelles conséquences économiques ?

L'argument de la destruction d'emplois avancé par les laboratoires n'a pas convaincu Agnès Buzyn : « Je suis la ministre de la Sécurité sociale, dont l'argent n'a pas vocation à soutenir des entreprises même si elles sont françaises. En revanche, tout le gouvernement est très mobilisé sur les questions d'emploi. Je ne crois pas pour autant que l'économie des trois laboratoires sera déstabilisée car les Français continueront à utiliser l'homéopathie. », indiquait-elle au Parisien.

Selon ses chiffres, les traitements homéopathiques remboursés sont consommés par 7 millions de Français pour un montant de 18 euros par an en moyenne. Le déremboursement devrait donc permettre à la Sécurité Sociale d'économiser environ 126 millions d'euros par an. Ce à quoi s'ajouteront des recettes de TVA, puisque les médicaments pris en charge par la solidarité nationale sont taxés à 2,1%, tandis que les autres le sont à 10%.

Néanmoins, les laboratoires expliquent que le déremboursement pourrait provoquer un report sur d'autres traitements, remboursés mais plus chers. Un argument très discuté, et qui fait réagir Agnès Buzyn : « L'objectif n'est pas un report mais une diminution de la consommation d'antibiotiques, de psychotropes. (...) Je veux une réduction de l'usage de médicaments qu'ils soient homéopathiques ou standards. (...) C'est le rôle des médecins de ne pas prescrire un médicament quand il n'est pas absolument nécessaire », expliquait-elle sur RTL.

Les homéopathes sont souvent des médecins généralistes qui ont suivi une formation complémentaire en homéopathie. Le prix moyen d'une consultation varie généralement entre 30 et 55 €. Le prix d'un tube dépasse rarement 2 €. Certaines mutuelles proposent une prise en charge optionnelle.



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