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Le gouvernement prépare une nouvelle loi pour favoriser l'économie circulaire et le recyclage des déchets. Transposant des directives européennes, elle devrait contraindre industriels et distributeurs à favoriser l'écoconception. Une tendance reflétée par les changements de comportement des particuliers, pour qui le développement durable est devenu un argument de consommation.
La révolution industrielle a apporté avec elle un mode de consommation « linéaire » : extraire et transformer les matières premières, consommer puis jeter. Mais la raréfaction des ressources, l'accumulation des déchets non traités à travers le monde et la pollution ont progressivement fait prendre conscience que ce modèle économique n'est pas soutenable à long terme. La consommation responsable prend de l'ampleur, comme la lutte contre le gaspillage. La responsabilité sociétale, de développement durable et de respect de l'environnement deviennent des arguments de choix pour les consommateurs et cette tendance de fond se propage dans tous les secteurs de l'économie. D'un côté, le monde de la finance opère même un basculement progressif vers « l'investissement socialement responsable » (ISR), qui consiste à évaluer les opportunités d'investissement au moyen de critères extra-financiers parmi lesquels on trouve l'impact environnemental. De l'autre, les particuliers s'organisent pour favoriser l'économie circulaire, que ce soit par conviction ou pour une question de budget. L'achat de « seconde main » se limitait jusqu'à récemment aux véhicules. Aujourd'hui il concerne quasiment tous les produits non-alimentaires : livres, jouets, vêtements, électroménager, meubles... La crise économique étant passée par là, acheter un produit ayant déjà servi se résume parfois à une volonté d'acheter moins cher, et Internet n'a fait que faciliter les choses, notamment en contribuant à mettre en relation des acheteurs et des vendeurs de biens d'occasion. De même, jeter devient progressivement moins systématique comme le démontre le succès du site CommentReparer, qui édite des tutoriels pour réparer soi-même tout type de produits : télévision, voitures, aspirateurs, mobilier, chaudières...
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Des entreprises se sont également mises à réparer ou recycler des objets dans le but de les revendre : c'est ce que l'on nomme le « reconditionnement ». L'exemple des téléphones mobiles est le plus parlant. Selon une étude du cabinet Counterpoint Research, 140 millions de smartphones reconditionnés ont été vendus en 2017 dans le monde. Un marché en forte progression : +13% en un an. En 2018 en France, le marché des smartphones neufs a baissé de 6,5% alors que celui des reconditionnés a progressé de 7% (étude de l'institut Gfk). 2,1 millions d'appareils ont ainsi été vendus, souvent sous garantie, après avoir été contrôlés et réparés si nécessaire. Et tout cela ne fait que commencer. Selon un sondage de Kantar pour Recommerce, 60% des Français sont intéressés par l'achat d'un smartphone reconditionné chez un professionnel. Un fait qui ne doit rien au hasard : les générations récentes de smartphones ne présentent plus d'innovation de rupture. Pour certaines marques, les prix sont également de plus en plus chers. Or, d'après l'ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie), au moins 30 millions de téléphones mobiles « dorment dans nos tiroirs » et « seulement 15% (...) sont collectés pour être recyclés ». Le potentiel du marché est considérable pour les années à venir.
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Un des facteurs qui pourrait contribuer à la réduction des déchets est l'allongement de la durée de vie des produits non-recyclables. Or, dans certains cas, c'est l'inverse qui se produit. L'obsolescence programmée est le fait de réduire intentionnellement la durée de vie d'un produit pour accélérer le besoin de renouvellement des consommateurs. Si l'intention des industriels est difficile à prouver, le procédé peut, selon toute vraisemblance, être simple à mettre en place sur des produits électroniques ou par le biais de la fragilisation des matériaux (collants qui filent très vite par exemple). Le secteur des imprimantes est ainsi régulièrement pointé du doigt. En 2017, l'association Halte à l'Obsolescence Programmée (HOP) a, pour la première fois en France, déposé plainte contre les 4 leaders du secteur à savoir HP, Canon, Epson et Brother sur ce motif. Aux États-Unis, Apple s'est également retrouvé dans la tourmente. La société était accusée de tromper ses consommateurs (la notion d'obsolescence n'existant pas juridiquement). Pour préserver son image, le géant a dû reconnaître publiquement qu'il ralentissait ses iPhones, mais uniquement dans le but, selon lui, de préserver les composants. L'annonce a été suivie de l'ouverture d'une enquête par le parquet de Paris pour obsolescence programmée et tromperie, avec à la clé un gros risque financier si l'entreprise est reconnue coupable. En France, la loi du 17 août 2015 permet d'infliger une amende allant jusqu'à 5% du chiffre d'affaires annuel moyen réalisé sur les 3 dernières années.
Face aux enjeux et à la mutation des mentalités, les politiques publiques tendent à favoriser le basculement vers une économie de réutilisation et de recyclage, ce qui implique une transition de l'économie. Petit à petit, les règles imposées aux industriels deviennent donc plus contraignantes. Après l'adoption en 2018 de règles concernant l'économie circulaire par l'Union Européenne, la France est en pleine préparation d'un texte de loi sur le sujet. Celui-ci devrait être débattu au Parlement fin 2019 ou début 2020. Son objectif est notamment de favoriser le recyclage et d'élargir la responsabilité des producteurs en les obligeant à mieux contribuer à la prévention et à la gestion des déchets issus de leurs produits. Les plateformes de e-commerce pourraient aussi porter une partie de cette responsabilité. Actuellement, c'est plutôt la responsabilité de celui qui produit le déchet qui est retenue. Si le texte définitif le confirme, la responsabilité juridique des producteurs d'emballages plastiques pourrait par exemple être engagée. Il se pourrait que la mise en œuvre de la loi incite les industriels à trouver des solutions moins polluantes. Le texte prévoit également un élargissement du bonus/malus appliqué sur les produits en fonction de leurs performances écologiques. Par ailleurs, de nouveaux secteurs seront concernés par les obligations environnementales imposées par cette loi, comme le BTP, la fabrication de jouets, d'articles de sport et loisirs, de bricolage et jardinage, mais aussi les voitures et autres véhicules à moteur. Enfin, le texte inclut un volet dédié à l'information des consommateurs. En février 2018, la secrétaire d'État à la Transition écologique et solidaire Brune Poirson a annoncé la mise en place d'un indice de durée de vie sur les produits électroniques et électroménagers.
Selon une étude du cabinet Accenture à l'occasion de la COP 21 (2015), l'économie circulaire pourrait générer 4 500 milliards de dollars d'ici 2030. Il s'agit donc d'un marché énorme, lié à un changement de modèle. Les mentalités et les usages changent, les ressources s'amenuisent, la loi devrait devenir de plus en plus contraignante. Par conséquent, les stratégies des entreprises changent également. L'économie circulaire est par exemple devenue un des éléments de l'identité de l'entreprise Seb, numéro un mondial dans le domaine du petit équipement domestique. La société s'est engagée dans une politique de « produit 10 ans réparable ». Elle a également mis en place depuis 2015 un service de location d'équipement électroménager culinaire, et s'engage dans le recyclage des produits en fin de vie. Une stratégie de développement durable s'est également mise en place chez le groupe Fnac Darty. Le distributeur développe un service de réparation de smartphones et tablettes (société WeFix) et s'investit dans le reconditionnement des produits. Du côté des acteurs de la finance, BNP Paribas AM vient de lancer un fonds indiciel calé sur l'économie circulaire, une première mondiale selon la société. L'objectif est de « permettre aux investisseurs de prendre part aux opportunités liées à ce changement de paradigme », expliquait Isabelle Bourcier, responsable des gestions quantitative et indicielle à La Tribune. « La prise de conscience des impacts environnementaux de leurs modèles économiques, les évolutions réglementaires en matière de préservation des ressources poussent les entreprises à adopter des stratégies de développement alternatives vers un modèle plus vertueux », indiquait Robert-Alexandre Poujade, Analyste ESG au sein du Sustainability Centre de BNPP AM.