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Le terme de « bulle immobilière » est utilisé depuis quelques années. L’idée sous-jacente : la crainte des professionnels de l'immobilier qu’un effondrement des prix mette un coup d’arrêt aux transactions. Afin de mieux comprendre cette notion et d’estimer s'il est justifié d'avoir des craintes lorsque l'on est un particulier, voici quelques éclaircissements.
L'expression « bulle immobilière » fait référence aux « bulles financières », dont le phénomène serait appliqué au marché immobilier. Dans le langage financier, une « bulle » représente, sur un marché donné, un niveau de prix très supérieur à la valeur réelle de ce qui est échangé. La demande est dans ce cas largement supérieure à l'offre, avec pour effet une hausse des prix. Voyant cela, certains acquéreurs sont tentés d'acheter pour revendre quelques temps plus tard, profitant de la hausse pour faire un bénéfice. Une partie de la demande devient alors « spéculative » : les biens ne sont pas échangés pour être utilisés, mais pour le bénéfice financier qu'ils pourront procurer à la revente. Le problème, c'est que ce phénomène de « bulle financière » est généralement suivi d'un « krach ». Après une période de croissance irraisonnée des prix, le marché se bloque de façon soudaine. Parce que les prix ont atteint un niveau tel qu'il n'y a plus d'acheteur, ou parce qu'un évènement extérieur change le comportement des acheteurs et des vendeurs. A partir de ce moment, la tendance s'inverse : l'offre devient supérieure à la demande. Les prix commencent à baisser. Constatant cela, les « spéculateurs » remettent rapidement leurs biens ou titres en vente pour éviter de perdre de l'argent. Il y a davantage de biens à la vente, et par conséquent la baisse des prix s'accélère. Voyant cela, de plus en plus de personnes veulent « limiter la casse » en vendant à leur tour. En parallèle, les acheteurs se raréfient (pourquoi acheter au moment où les prix baissent ?). La chute des prix s'amplifie de façon exponentielle : c'est le « krach ». Ce phénomène s'observe sur les marchés boursiers. Le premier de l'histoire s'est produit en 1637 en Hollande sur le marché de la tulipe. Alors que cette plante n'intéressait que les horticulteurs et universitaires, une mode dans les milieux bourgeois a eu pour effet d'augmenter fortement la demande. Chacun voulant sa tulipe et les quantités étant limitées, les prix se sont envolés. Certains se sont mis à spéculer sur le marché en achetant et revendant non plus des tulipes, mais des « options d'achat de tulipes », avec pour effet une hausse continue des prix et une déconnexion avec les quantités réelles, jusqu'à l'effondrement du système. Un mouvement spéculatif de bien plus grande importance a également été un des facteurs de la crise de 1929 et de celle de 2008 aux Etats-Unis (il était en effet possible de spéculer sur la dette immobilière des ménages). Il y a quelques mois certains annonçaient l'explosion de la bulle immobilière au Royaume Uni suite au Brexit.
L'existence d'une « bulle immobilière » est difficile à démontrer. Une hausse des prix seule ne suffit pas pour justifier l'utilisation du terme « bulle ». Pour qu'elle existe, il faudrait qu'il existe une distorsion entre la valeur d'usage des biens immobiliers et leur valeur d'échange. C'est cette notion qu'il est difficile d'entrevoir, d'autant qu'il existe plusieurs marchés immobiliers très différents les uns des autres (logements, bureaux, commerces, terrains constructibles…) et que la formation des prix dépend de nombreux facteurs (crédit, conjoncture économique, emplacement, travaux…). Certes, la spéculation, autrement dit l'achat-revente dans une optique de plus-value, existe dans l'immobilier. Cependant cette activité reste assez marginale au regard du nombre de transactions, notamment en ce qui concerne le logement. L'interdiction de revendre les compromis de vente depuis le milieu des années 1990 a considérablement ralenti la spéculation sur la hausse des prix immobiliers. Par ailleurs, un marché dans lequel les prix sont déjà considérés comme « hauts » n'est pas favorable à l'activité spéculative. Contrairement aux bulles qui ont pu être observées sur les marchés financiers, il est difficile d'imaginer que ce soit cela qui maintienne les prix à leurs niveaux actuels. Un des arguments plaidant en la faveur de l'existence d'une bulle immobilière en France est l'écart important constaté depuis une quinzaine d'années entre les fondamentaux économiques tels les salaires ou le rendement locatif, et le prix de l'immobilier. L'étude de référence de Jacques Friggit montre que l'indice des prix a considérablement augmenté par rapport au revenu des ménages depuis la période 2000 – 2002. Ce décrochage très net fait craindre à certains un futur effondrement des prix, d'autant que le nombre de biens vendus chaque année depuis l'an 2000 a beaucoup baissé. Autre phénomène contribuant fortement au maintien de prix des logements au mètre carré à un niveau très hauts : les taux d'intérêt en perpétuelle baisse depuis les années 90, passant de plus de 9% par an à un peu moins de 6% en 2000, et enfin 1,6% environ en décembre 2016. Schématisons l'effet de cette baisse sur la capacité d'emprunt d'un particulier, en prenant une personne avec 2 000 euros de revenu mensuel, qui contracte un emprunt immobilier sur 20 ans en s'endettant à hauteur de 30% : • En 1991, il pouvait emprunter 66 000 € de capital pour acheter un logement • En l'an 2000, sa capacité d'emprunt était de 85 000 € • Enfin aujourd'hui, il pourrait emprunter 123 000 € En remboursant le même montant chaque mois, les acheteurs potentiels paieront moins d'intérêts, mais plus de capital. Cette incroyable baisse des taux sur le long terme (25 ans) a provoqué un renchérissement du prix des biens. L'évolution des taux d'emprunt a en effet une forte influence sur le niveau des prix.
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Dans le cas de l'immobilier, le terme de « bulle » faisant un parallèle avec les « bulles financières » est peut-être un peu excessif. Pas de survalorisation rapide, et dans la masse des transactions, rares sont les achats spéculatifs. Les prix de l'immobilier n'ont cessé de monter entre 2000 et 2005. Depuis, ils varient à la hausse et à la baisse en cycle de 5 ans environ, et de façon assez limitée. En dehors d'une rapide remontée des taux d'emprunt ou d'un phénomène exceptionnel et inattendu qui aurait pour effet de bloquer les transactions, il semble peu probablement que le marché se « retourne » à la manière d'un krach boursier.
L'immobilier a en effet toujours une valeur d'usage, et la grande majorité des acheteurs sont les utilisateurs du bien. Il n'est cependant pas exclu que les prix amorcent un jour une descente mesurée et plus ou moins durable, notamment en cas de remontée du coût des crédits ou d'augmentation du nombre de biens à vendre. Pour le particulier, l'économie sur le prix d'achat sera alors peut-être compensé par les intérêts supplémentaires qu'il devra verser à la banque.